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Flora Irel, l’héroïne qui révolutionne la communication politique en Afrique francophone

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La communication politique peut se définir comme « l’espace où s’échangent les discours contradictoires de trois acteurs : les hommes politiques, les journalistes et l’opinion publique au travers des sondages. Ceux-ci ont pleine légitimité à s’exprimer publiquement sur la politique ». La communication politique se fait en période électorale, entre deux élections, en situation de crise politique intérieure ou extérieure. C’est la définition que nous donne Flora Irel à propos de cette notion. Cette jeune femme ivoirienne, diplômée de l’Ecole Française des Attachés de Presse et des Professionnels de la Communication (EFAP) et titulaire d’un diplôme d’études universitaires générales en Anglais de l’Université Félix Houphouët Boigny, s’est lancée dans la Consultance politique à l’attention de leaders. Son ambition, professionnaliser un milieu laissé trop longtemps aux mains d’amateurs.

Changer d’ère pour une société civile et politique plus saine

Il est contradictoire que l’on reconnaisse de plus en plus l’importance des métiers de la communication sans forcement penser à mieux organiser la communication politique. C’est le constat qui ressort de l’expérience panafricaine de Madame Irel. En effet, de la Côte d’Ivoire, en passant par le Togo et la RDC où elle séjourne actuellement, les personnes qui se chargent de ce pan oh combien important de la vie des élus et leaders restent leur cercle le plus familier. On parle alors de « bois sacré », « sa base », d’ « entre – gens ». Ce qui a pour effet de décrédibiliser le travail et l’image des acteurs politiques. Car ces personnes sont forcées à apprendre sur le tas les rudiments d’un métier à diverses variantes.

Le cabinet Irelec de Madame Irel offre aujourd’hui à une cible de personnes clées( ministres, maires, députés, candidats, élus, dirigeants, managers, cadres, Experts comptables, avocats, huissiers, notaires…)un accompagnement à titre individuel et collectif; avec quatre axes pour la montée en puissance des leaders : 

  1. L’audit en communication ;
  2. Le conseil en stratégie de communication ; 
  3. L’accompagnement en bonnes pratiques ; 
  4. La team building. 
Madame Flora Irel

« Le but du présent exercice est de rappeler que la communication est un espace professionnel et un marché du travail. Ce qui suppose un investissement dans la légitimation de l’activité des professionnels qui s’y consacrent »

Pourquoi est-ce si important de passer à cette étape de professionnalisation?

En politique, l’image est cruciale et il faut absolument pouvoir la construire et c’est à partir d’une image positive que passeront les discours et messages.La communication politique nécessite, selon l’experte, une approche pluridisciplinaire. 

Véritable oeuvre technique, la communication politique voit s’enchevêtrer plusieurs disciplines. D’abord, la sociologie des professions dans l’équipe de campagne (en relevant le côté fonctionnaliste puis interactionniste de tous les groupes professionnels, la légitimité, le mandat de chacun d’eux, l’exposition de leurs pratiques, leur rôle dans l’organisation) puis, les stratégies de marketing électoral (la politique reprend les codes du marketing économique donc d’un 4P spécifique politique mix) pour aboutir à la sémiologie pour la communication symbolique (au-delà de l’énonciation verbale, s’intéresser aux procédures et stratégies qui se manifestent dans plusieurs langages visuels, sonores, gestuelles, etc…). De ce qui précède, il est donc important de s’entourer de personnes aguéries et bien formées.

Le plan d’action et la stratégie de Madame Irel a été dévoilé en Côte d’Ivoire ce Mercredi 06 Octobre 2021 au Grand Hôtel d’Abidjan lors d’un Café de presse. L’experte a pu dévoilé sa grande maitrise des outils de communication ainsi que sa volonté de redynamiser le secteur et de le challenger davantage. Une véritable Héroine.

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L’aventure à tout prix : le calvaire de la migration irrégulière des femmes ivoiriennes (partie 1)

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Des migrants dans un centre de détention en Libye. (c) Photo OIM/2017

Entre 2017 et 2019,  un quart des migrants de retour en Côte d’Ivoire étaient des femmes. Soit 5 fois plus que le taux global observé dans les autres pays d’Afrique de l’ouest francophone selon un rapport de l’organisation internationale pour les migrations (OIM) publié en septembre 2019. En 2018, les femmes ivoiriennes faisaient partie du top 5 des nationalités ouest africaines déclarées arrivées illégalement par la mer sur les côtes italiennes. Elles surpassaient de loin le Burkina Faso, le Mali, la Guinée Si la proportion des femmes ivoiriennes se rapproche de celle du Nigéria, le ratio avec la population  des deux pays place la Côte d’Ivoire en première place devant le Nigéria (10%). Au même moment, les migrants ivoiriens représentent la troisième nationalité d’Afrique de l’Ouest et centrale à arriver de manière irrégulière en Espagne, constituant 4 % du total des arrivées avec environ 3 000 arrivées déclarées. En Italie, « alors que les femmes ne représentaient que 8% des Ivoiriens ayant débarqué en 2015, elles représentent 46% du total en 2019». La plupart d’entre elles subissent une forme d’exploitation au cours de leur parcours et reviennent souvent totalement désillusionnées quand elles ne trouvent pas la mort en route. Zoom sur le rêve cauchemardesque de ces migrantes.

Emma, 31 ans, Ivoirienne rescapée de la migration irrégulière, nous raconte son histoire. 

EMMA TIAN LOU, Migrante de retour

Nous l’avons rencontrée un lundi après-midi, dans la commune de Treichville, dans le sud d’Abidjan. Elle, c’est Emma Flora Tian Lou, une ex-migrante de retour comme elle aime se définir. Son histoire prend pied en 2016 quand, à 26 ans, la jeune femme entame son voyage. Cette même année, elle a pour compagnes d’infortune d’ autres femmes ivoiriennes qui traversent le Sahara et la Méditerranée portant en elles le rêve de l’Europe à tout prix. Pourquoi a-t-elle décidé de prendre cette décision ? Selon elle, ses conditions de vie étaient de plus en plus difficiles. En effet, avec son emploi de coiffeuse, elle n’arrivait pas à subvenir à ses besoins ainsi qu’à ceux de sa fille de 7 ans dont elle avait l’entière charge. Elle décide alors d’emprunter ce qu’elle considère comme la route de l’espoir, encouragée par son fiancé déjà en exil au Maroc. Sa première destination fut l’Algérie où elle espérait exercer un travail d’aide-ménagère qui serait rémunéré à 49.000 fcfa/Semaine, soit 196.000 fcfa/mois. Ce qui est de loin supérieur à ce qu’elle pouvait prétendre gagner en Côte d’Ivoire où le SMIG (salaire minimum interprofessionnel garanti) est fixé à 60.000 et le métier de coiffeuse qu’elle exerçait depuis des années ne lui rapportait que 30.000 fcfa mensuellement. Pour elle qui peinait parfois à obtenir 1.000 fcfa par jour, ce voyage en Afrique du Nord avait pour objectif de réunir un financement conséquent et revenir en Côte d’Ivoire pour investir dans la réalisation de ses projets.

Devant l’insuffisance de ses moyens financiers, c’est la voie terrestre qui s’impose à elle afin d’arriver en Algérie en passant par le Ghana, le Togo et le Niger. Mais c’est véritablement à Agadez (Niger), pendant la traversée du Sahara, que débute son calvaire. Mal informée, Emma avait sous-estimé la dangerosité de la région. Le désert ” il n’y a pas d’entrée, pas de sortie“, confie-t-elle. C’est avec un traumatisme qu’elle vit en direct les abandons de ses compagnons d’infortune qui ne peuvent embarquer immédiatement lorsque adviennent des pannes du véhicule. Les passeurs ne peuvent risquer de se faire prendre par la police. Emma, qui avait prévu de rester en Algérie, fait avec son compagnon l’expérience du racisme par des injures et autres mauvais traitements. C’est ainsi qu’enceinte de cinq mois, une autre traversée du désert s’impose à elle dans l’optique d’atteindre la Libye. Cette fois, elle subit une agression sexuelle de la part d’un des chauffeurs, qui surement ému par ses supplications ne va pas au bout de sa tentative de viol. Une autre femme, n’a pas cette chance et est abusée publiquement, sous les yeux de tous les occupants du véhicule. Après le désert, Emma arrive en Libye. L’espoir pour elle renaît. Elle pourra enfin prendre le large pour l’Italie. Contre toute attente, elle et bien d’autres femmes d’Afrique de l’Ouest sont arrêtées et faites prisonnières à Tripoli, avec la complicité de leurs propres passeurs et sont enfermées avec des centaines hommes. Enceinte, et en proie aux coups de fouet, elle n’a reçu aucun soin médical durant les trois semaines passées derrière les barreaux. Emma mange très peu dans sa condition, juste une fois par jour. Les dons des organismes humanitaires sont détournés par leurs bourreaux.

 « J’ai dit que je préfère qu’il me tue plutôt qu’il abuse de moi, je lui ai dit que je suis enceinte (…) Il m’a attrapée par les cheveux, m’a brutalisée, s’est frotté contre moi (…)

Il y a une passagère camerounaise qui n’a pas pu y échapper. Il l’a déshabillée devant tout le monde, y compris son copain et sa tante, et a abusé d’elle sous nos yeux ».

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Témoignage audio d’Emma/ sa tentative de viol et ses conditions de détention en Lybie

Quel itinéraire empruntent les femmes ivoiriennes?

Plusieurs itinéraires sont empruntés par les migrants et les migrantes convergeant tous vers l’Afrique du Nord. Les principales routes terrestres passent par le Burkina-Faso et le Mali. Les voies aériennes sont plus empruntées par les femmes. Selon Hervé N’Dri, président-fondateur de l’ONG LISAD (Lutte contre l’Immigration illégale Secours Assistance et Développement), l’itinéraire des femmes ivoiriennes se subdivise en trois grandes périodes migratoires. Ainsi, jusqu’en 2011, celles-ci avaient pour destination le Liban, au Moyen-Orient, où elles exerçaient les travaux domestiques une fois sur place. Entre 2011 et 2015, on a pu observer le boom de la migration clandestine féminine et cette fois-ci ce sont les pays du Golfe qui sont visés, en l’occurrence le Koweït, le Qatar, l’Arabie Saoudite, le Bahreïn, le Kurdistan. Et c’était toujours une migration pour le travail. Depuis 2015, c’est par le Maghreb que les femmes ivoiriennes transitent pour gagner l’Europe. Les pays de choix sont alors la Tunisie et le Maroc. La principale raison est la facilité administrative de s’y rendre, notamment l’absence de visa entre la Côte d’Ivoire et ces deux pays.

En effet, 69% des hommes partent par la route et 30% par avion. Pour les femmes, 70% disent être parties en avion (60% vers la Tunisie et 10% vers le Maroc) contre 30% par la route, selon les chiffres de l’OIM. Plusieurs raisons sous-tendent ce choix. L’on peut aisément comprendre que la sécurité qu’offre la voie des airs est plus adéquate pour les candidates féminines qui préfèrent éviter les exactions qu’elles pourront rencontrer le long d’un voyage terrestre. Mais ce choix de voyage est également bien plus coûteux. Ce sont des milliers de francs qui y sont injectés. Cela signifie que les femmes bénéficieraient éventuellement de plus de moyens financiers au départ ou de promesses de rémunération à l’arrivée. 

La Tunisie a une position géographique stratégique entre l’Afrique subsaharienne et l’Europe qui au fil du temps a fait d’elle une destination de premier choix pour les candidats à la traversée de la Méditerranée. C’est ce que nous rapporte la Radio Libre Francophone (RLF), interrogée à ce sujet. Chez les femmes, on assiste également à des changements d’itinéraire. Selon les données de l’OIM, il s’agit d’une réaction d’adaptation à des obstacles ou difficultés (voire des opportunités) qui se présentent, souvent à cause du manque d’informations fiables avant le départ. Cela est principalement le cas pour les femmes, qui avaient comme destination finale le Maroc ou la Tunisie et qui ont souhaité, par la suite, continuer jusqu’en Europe. En effet, elles se voient confisquer leurs passeports, ce qui crée des pénalités au-delà des trois mois de résidence autorisés sur le territoire. La traversée de la Méditerranée s’impose alors comme une évidence. Selon l’OIM, 19% des femmes contre 6% des hommes passent par un facilitateur ou un passeur pour financer leur migration malgré les risques encourus :  trafic et traite des personnes.

La Route de Méditerranée centrale, la route de tous les dangers

La route de la Méditerranée centrale  est une route migratoire traversant la mer Méditerranée au niveau de la côte ouest de la Libye, et rejoignant l’Italie ou Malte. Il s’agit de la principale voie d’accès à l’Union européenne au départ de l’Afrique. Pour les femmes ivoiriennes, comme pour la plupart des personnes originaires d’Afrique subsaharienne, la route empruntée est la route méditerranéenne centrale depuis la Libye, point de départ de la traversée maritime en direction de l’Italie. Les Ivoiriennes en majorité (62%), quittent la Côte d’Ivoire, transitent ou font escale en Tunisie, puis entrent en Libye. Les hommes voyagent majoritairement par la route avec différents parcours entre le Mali, l’Algérie et le Niger pour atteindre la Libye. Elle fait partie avec les routes de de la Méditerranée de l’Est et de l’Ouest des trois voies principales de la migration irrégulière. Elle est de loin la plus meurtrière et est de ce fait surnommée le ”tombeau des migrants”. De 2014 à 2021, le projet missingmigrants -une initiative mise en place par l’OIM pour documenter les décès et les disparitions de personnes en cours de migration vers une destination internationale-a dénombré plus de 8000 personnes qui y sont décédées contre à peine plus de 700 sur la Méditerranée de l’Est et 1000 sur celle de l’Ouest.

Entre arnaques et faux papiers, les réseaux clandestins de plus en plus puissants

Les femmes en particulier sont prises au piège de la désinformation en ce qui concerne le domaine de l’emploi et des conditions sociales et sociétales de la Tunisie. Elles se laissent alors aller par ce que les passeurs ou leurs connaissances sur le territoire leur font miroiter. Ce réseau facilite la migration des femmes ivoiriennes et les appuie avant le départ. Selon RLF, ce sont autant des Tunisiens que des subsahariens qui travaillent au départ des migrantes. Ils sont présents partout et utilisent les outils du digital tels que les réseaux sociaux les plus populaires ou les applications de messagerie les plus efficaces pour diffuser les informations et toucher le plus grand nombre en toute discrétion. 

L’ONG LISAD (Lutte contre l’immigration illégale secours assistance et développement) affirme que ces personnes se trouvent partout, y compris dans les communautés religieuses, et procèdent par la méthode du bouche-à-oreille en jouant surtout sur leur crédibilité. Ce sont parfois des hommes de Dieu, des pasteurs, des imams… 

Il y a des hommes de Dieu, des imams, des pasteurs, qui recrutent les candidates à la migration irrégulière dans leurs communautés

ONG LISAD

Mais leur rôle ne se limite pas qu’à établir le contact, il va jusqu’à donner au voyage un aspect mystique et religieux, révèle Cherif Aziz, chargé de l’insertion professionnelle et de la migration des jeunes au sein de l’Union de la Jeunesse Communale de Daloa. Ces derniers sont installés en Tunisie, prient pour le bon déroulement du voyage et font office de passeurs. Une tactique d’endoctrinement qui sert à mettre en confiance les migrants quant au fait que la providence divine est de leur côté.

Sarah, une migrante de retour que l’on a rencontrée à Daloa, indexe les responsables des agences de recrutement des domestiques qui appâtent les filles qu’ils recrutent, en leur faisant miroiter un mieux-être à l’étranger. C’est par ce biais qu’elle a elle-même été embarquée pour le Koweït. Ces derniers, sans foi ni loi, vont jusqu’à falsifier l’état civil des plus jeunes, qui n’ont pas atteint l’âge légal de travailler dans ces pays, afin de faciliter leur expédition. Une véritable traite humaine qui se joue parfois en complicité des familles.

L’ONG LISAD corrobore cette information. Les femmes, explique Hervé N’Dri, sont appâtées par des réseaux ou des individus qui leur promettent de payer le voyage quand elles n’ont pas suffisamment de moyens.  Ce qui inclut l’achat du billet et du visa pour les pays où cela est nécessaire. Pour ce faire, les intermédiaires font miroiter à l’arrivée des emplois bien rémunérés avec des conditions de vie et de travail agréables. Ils ne disent par exemple pas qu’elles seront des domestiques mais qu’elles pourront continuer d’exercer leurs emplois d’origine pour celles qui le désirent. Sarah, ancienne domestique et migrante retournée a vécu la même expérience; ‘‘J’ai été interpellée par un agent de placement qui m’a donné de fausses  informations sur les conditions de vie au Koweït. Il m’a fait croire que j’allais être en pleine liberté avec un salaire rémunéré. Dès notre arrivée, on nous a confisqué notre passeport. Après deux heures de temps, nos employeurs sont venus nous chercher’’, nous témoigne t-elle.

Par ailleurs, ces réseaux sont très puissants car ils arrivent à détourner la vigilance de l’État ivoirien, qui a mis en place des restrictions quant aux voyages vers les pays du Golfe, en faisant transiter par la voie terrestre les femmes par les pays frontaliers que sont le Ghana, le Mali, le Burkina-Faso, le Bénin, le Togo. Objectif : détourner l’attention des autorités. Pour ce faire, ils leur font aussi établir des faux documents prouvant une activité commerciale. Une fois dans ces pays, elles sont reçues par un passeur qui les aide à migrer. Parfois, elles vont jusqu’à adopter illégalement la nationalité de ces pays de transit pour faciliter leurs voyages. Ce qui rend difficile la protection diplomatique de l’État de la Côte d’Ivoire quand le piège se renferme sur elles.

Retrouvez la deuxième partie de cet article ici.

Enquête réalisée par : Carelle Laetitia Goli, Charline Tiahi et Marthe Akissi de RTI info. Une initiative soutenue par Medialab Pour Elles, un projet CFI-Agence française de développement médias, avec le soutien de Anderson Diedri et Satou Kané.

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Les abidjanaises en danger?L’ONG CPDEFM dévoile l’inquiétante réalité des violences faites aux femmes à Abidjan.

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Plus que jamais, les violences faites aux femmes cristallisent l’attention, et deviennent un véritable enjeu de politique publique en Côte d’Ivoire. Malheureusement, si les voix se délient l’un des plus grands enjeux est la production de données ouvertes qui pourraient documenter ce phénomène. De ce fait, l’Organisation des Citoyennes pour la Promotion et Défense des Droits des Enfants, Femmes et Minorités (CPDEFM) créée par Madame Sylvia APATA, juriste, experte en Droits Humains, Consultante en Droits des Femmes; dans son optique de protection des plus vulnérables a produit le Rapport sur les Violences faites aux Femmes et aux Filles (VFF) dans le District d’Abidjan en période de pré et de quotidienneté Covid19, Abidjan, en Juin 2021, dont les résultats ont été présentés ce Mardi 15 Juin 2021 devant la presse internationale, nationale, les décideurs et les partenaires au développement .

Pourquoi une telle enquête?

Il s’agissait pour CPDEFM de parvenir à quantifier le taux de victimes de VFF (Féminicide, viol, pédocriminalité, mariages forcés, excision) dans les six (6) Communes cibles ; d’évaluer les violences que subissent les femmes et les filles en période de confinement et de quotidienneté COVID-19, afin d’interpeller l’opinion nationale et internationale sur l’ampleur des violences faites aux femmes et aux filles en Côte d’Ivoire notamment à Abidjan. Dans cette démarche, les données collectées viseront à contribuer à la prise de conscience des populations abidjanaises vis-à-vis des
conséquences des violences sur les victimes. C’est aussi une démarche politique qui a à terme de susciter des actions concrètes de l’Etat ivoirien en vue de leur réduction voire éradication.

Analyse du contexte spatio temporel et de l’échantillonage retenu

Ledit rapport a pris en compte six (6) communes du District d’Abidjan
(Communes les plus populaires) que sont : Abobo, Anyama, Attécoubé, Koumassi, Treichville et Yopougon, à propos du phénomène des violences faites aux femmes et aux filles en l’occurrence l’excision, le mariage forcé, le viol, la pédocriminalité et le féminicide.

Les enquêteurs et enquêtrices ont interrogé cinq mille cinq cent cinquante-six (5556 personnes) parmi lesquels figuraient des jeunes, des adultes et des personnes du troisième âge, choisis au sein de toutes les couches socio culturelles et vivant différentes types de situation matrimoniales. dont la moyenne d’âge de l’échantillon varie de 14 à 60 ans. Au total figuraient trois mille quatre cent quatorze (3414) femmes et environ deux-mille
cent quarante-deux (2142)
.

Tous les sexes, couches socio-professionnelles et niveaux d’instruction ont ainsi été pris en compte dans la mise en œuvre de cette étude. Les violences dont il est question ont été évaluées en période pré Covid-19, en période de confinement et de quotidienneté Covid-19. En effet, si l’on ne décrit les effets que sanitaires et économiques de la pandémie il est indéniable qu’elle a exposé encore plus les victimes de violences. La quantité significative et la diversité de la population cible permet de collecter des avis objectifs et variés et de réduire les marges d’erreur.

Quelques résultats obtenus en matière des VFF analysées:

Sur les 6 communes concernées, Anyama, Treichville et Attécoubé sont celles enregistrent respectivement 1322, 776 et 749 cas. 1290 cas de mariages d’enfants (filles âgées de moins de 18 ans) ont été recensés avec un pic en période de confinement environ 430 cas signalés. Concernant le viol (commis sur des femmes), ce sont 1 121 cas enregistrés (2019-2020).
Les féminicides sont par ailleurs une réalité à Abidjan. Cette enquête réalisée auprès des populations abidjanaises révèle que 416 femmes sont mortes sous les coups de leur conjoint ou partenaire intime au cours de ces deux dernières années. La Commune d’Abobo est la zone où il est enregistré le plus grand nombre de cas (125).

La Commune d’Abobo est la zone où il est enregistré le plus grand nombre de cas (125).

Rapport sur les Violences faites aux Femmes et aux Filles (VFF) dans le District d’Abidjan en période de pré et de quotidienneté Covid19, Abidjan, Juin 2021.

Interprétation- les VFF une réalité inquiétante en Côte d’Ivoire.

Les enfants particulièrement les filles sont plus exposées aux violences que les femmes : le mariage forcé est la violence la plus répandue de toutes les VFF documentées (29,66%) dans les 6 localités cibles. Les femmes sont majoritairement victimes de viol (25,77% des VFF signalées par
les populations).

L’excision et la pédocriminalité (pédophilie) touchent respectivement 19,03% et 15,98% des enfants (majoritairement les filles) dans ces 6 localités.

Le féminicide -meurtre d’une femme, d’une fille en raison de son sexe- est une réalité à Abidjan, avec un taux alarmant de 9,56% durant les années 2019 et 2020. Les Communes d’Anyama, Treichville et Attécoubé sont les zones des plus rouges en matière de VFF à Abidjan : Anyama (30,39%), Treichville (17,84%) et Attécoubé (17,22%).

Face à la récurrence des violences qu’elles subissent, les femmes d’Abobo y sont résignées. Elles sont pour la plupart dans le déni et se taisent (Seulement 11,08% admettent avoir été témoins de VFF). Toutefois, les résultats sur les féminicides la classant en tête de liste (125 cas soit 30,05%) permettent de la considérer comme zone rouge au même titre que Anyama, Treichville et Attécoubé.

La période de confinement ou de restrictions due au COVID-19 a exposée les femmes et les filles à plus de violences notamment les mariages forcés et viols signalés à une proportion plus élevé qu’en période pré-confinement et pré-Covid-19 (environ 30% des violences sexuelles constatées). Le confinement dû à la crise sanitaire a de ce fait amplifié les VFF à Abidjan.Face à la récurrence des violences qu’elles subissent, les femmes d’Abobo y sont résignées. Elles sont pour la plupart dans le déni et se taisent (Seulement 11,08% admettent avoir été témoins de VFF). Toutefois, les résultats sur les féminicides la classant en tête de liste (125 cas soit 30,05%) permettent de la considérer comme zone rouge au même titre que Anyama, Treichville et Attécoubé. La période de confinement ou de restrictions due au COVID-19 a exposée les femmes et les filles à plus de violences notamment les mariages forcés et viols signalés à une proportion plus élevé qu’en période pré-confinement et pré-Covid-19 (environ 30% des violences sexuelles constatées). Le confinement dû à la crise sanitaire a de ce fait amplifié les VFF à Abidjan.

Source : Rapport sur les Violences faites aux Femmes et aux Filles (VFF) dans le District d’Abidjan en période de pré et de quotidienneté Covid19, Abidjan, en Juin 2021

En définitive nous ne pouvons que remercier l’ONG CPDEFM qui contribue significativement à lutter contre toutes les formes de violences faites aux franges les plus vulnérables. Ce rapport gagnerait à être lu, partagé et surtout analysé comme un document indicatif sur les prochaines décisions à prendre en la matière. Car oui, il présente aussi des recommandations à toutes les parties prenantes à ce combat.

Sylvia Apata Membre fondatrice CPDEFM et coordonnatrice du Rapport sur les Violences faites aux Femmes et aux Filles (VFF) dans le District d’Abidjan en période de pré et de quotidienneté Covid19, Abidjan, Juin 2021

Lien de téléchargement du rapport:

http://cpdefmci.e-monsite.com/medias/files/rapport-de-l-enquete-sur-les-vff-a-abidjan-2021-cpdefm-1.pdf

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Ecriture libreFéminisme

Maintenant tu es une femme!

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(c) Picture AP Photo/S.Alamba; DW

Je ne sais pas ce que je fais dans cette maison avec toutes ces femmes qui m’auscultent, me surveillent, m’apprêtent depuis des jours. Parmi elles ma mère, je la sens heureuse, heureuse pour moi, dit-elle. Heureuse de me voir honorée, pas comme cette Maimouna ma cousine qui court les hommes. Moi aussi j’ai envie de partager sa joie, de la ressentir, mais je n’y arrive pas.

Il y a encore un mois je n’étais encore qu’une enfant, sautillant insouciante dans les ruelles de mon quartier. Mon seul souci était de terminer les devoirs de maison et de papoter avec ma meilleure amie sur le chemin du lycée. J’aimais ça l’école, j’ai été fascinée par ma maitresse du préscolaire, tellement intelligente que je voulais lui ressembler. Pour cela j’ai travaillé dur et je suis arrivée au collège avec de très bons résultats. Je pensais que tout allait continuer ainsi, mais un jour j’ai découvert ce sang dans mon lit, effrayée, j’ai crié. Maman est venue et m’a dit calmement maintenant tu es une femme. Une femme ? Mais j’étais quoi avant ? A partir de ce jour tout est allé trop vite. J’ai vu des personnes se succéder à la maison, on m’a dit avec fierté ils viennent pour toi. Puis papa et Oncle m’ont fait assoir pour me parler, maman se tenait un peu plus loin, je sentais un peu de crainte dans son regard fuyant. Il y avait de la cola et de l’argent, beaucoup d’argent. “C’est ta dot” m’ont-ils dit. Depuis ta naissance tu as été promise à ton cousin en France, maintenant que tu es une femme il viendra te prendre pour épouse.

Maintenant j’étais une femme! Cette phrase énigmatique prenait son sens, et ce mot résonnait lourd et révoltant. Non je ne suis pas une femme! Je suis Salimata et je ne veux pas être l’épouse de mon cousin en France et je ne veux pas de votre dot. J’ai voulu le crier fort et m’enfuir, mais je suis restée pétrifiée apeurée, seule, meurtrie, trahie… je venais d’être mariée. Personne ne s’opposait jamais ni à Baba ni à Oncle. Et ce n’est pas moi à 14 ans qui allait le faire. D’ailleurs mon père était aux anges, mes sœurs ne lui ont pas rapporté aussi gros disait-il à qui peut l’entendre. Il comptait prendre sa troisième épouse grâce à cet argent. J’ai essayé de dire à maman ce que je ressentais, elle a d’abord commencé à me battre en disant que je voulais son déshonneur, puis s’est mise à pleurer et à me supplier. Pense à moi, à tes frères et sœurs. Que dira ma coépouse ? Ma belle-famille ? Ton papa n’acceptera jamais de nous garder ici, on finira dans la rue. Elle aussi était une femme, aussi condamnée et malheureuse que moi. Je n’ai pas pu la detester, elle m’inspirait plus de la pitié qu’autre chose. Sur elle aussi un jour le piège s’était refermé.

Voilà comment une semaine plus tard, le henné est apparu sur les mains et mes pieds comme sil matérialisait les lignes de ma vie et de mon destin tout tracé. Je ne voyais plus mes amis de classe. Ceux et celles qui se hasardaient à me chercher subissaient les injures de mes tantes. Quelque part dans ma tête je pensais à mon institutrice, à mes rêves à ma vie, celle qu’on m’avait prise. Je devais rester chez ma belle-famille, le temps que les procédures administratives pour mon voyage prennent fin. Et comme j’étais très jeune, cela risquait de prendre au moins deux années. C’est ce qu’avait dit Oncle, selon lui les « les blancs ne comprennent rien à nos traditions et vont essayer de gâter le mariage s’ils savaient ».

Dans la chambre de préparation du mariage on m’a dit :

– « Tu vas finir par l’aimer ton époux et si tu ne l’aimes pas tant pis mais reste soumise et docile ».

– « Ne dis jamais plus qu’il ne t’en demande ».

– « Accepte tout et même les coups, car s’il t’en donne c’est que tu n’aurais pas fait été une épouse correcte ».

« Rends fière ta famille en lui faisant des enfants beaux et forts ».

Oui, à peine entrée dans l’adolescence, je devais penser à être mère. Une boule me serrait la gorge ce matin de décembre. La moiteur de mes mains n’était pas due à l’humidité du climat. Mais à cette nuit de noces qui approchait. J’étouffais sous ces apparats, ce maquillage, ce voile.

Puis d’un coup j’entendis au loin la griotte entamer un chant, et la foule qui s’extasiait avec elle.

« Ton mari est arrivé, c’est le moment de partir », m’a dit ma cousine…

En Afrique de l’Ouest, deux filles sur cinq sont mariées avant
18 ans, et environ une adolescente (10-19 ans) sur cinq a déjà donné
naissance
.

Au rythme de réduction actuel, l’Afrique de l’Ouest et du Centre mettra plus de 100 ans pour mettre fin au mariage des enfants. Cette région compte six des 10 pays où la prévalence du mariage des enfants est la plus élevée au monde.

Ce texte est dédié à toutes ce petites filles, à qui l’on arrache leurs vies… au nom du fait qu’elles soient des femmes.
.

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Féminisme

Le 8 Mars, ‘‘ la fête du pagne’’.

Pagne-Jif-2021

Le 8 Mars, cette journée ne semble plus à présenter car elle fait du mois de Mars, le mois, symbole des luttes féminines. Cependant, l’on dénote une certaine incompréhension de ce jour spécial qui a pris une tournure de fête. Ce qui de ce fait nous fait comprendre que l’on ne le rappellera jamais assez que loin d’être une fête, le 8 Mars est la journée internationale des droits de la femme…

Dans plusieurs pays africains, une nouvelle tendance est née depuis quelques décennies à l’approche de cette journée. La confection de pagne pour célébrer, je ne sais vraiment quoi. Ainsi, le 8 Mars, est devenu ‘‘la fête du pagne’’. Si les raisons de ces confections et distributions ( non gratuites) de pagnes sont louables, l’utilité de ceux-ci pose un problème. En effet, en prenant le cas de Côte d’Ivoire, le budget adjugé à cette simple journée serait de 160 millions de nos francs. Ce qui est un montant faramineux, surtout quand l’on regarde les conditions inchangées des femmes. Ces dépenses semblent être une insulte à la souffrance de celles-ci dans la mesure où l’on fait fi des problèmes prioritaires pour ne se concentrer que sur des « futilités ». les organisations, sur ce fait, ne se font pas prier et donnent de la voix.

(c) https://cotedivoirenews.info/journee-internationale-de-la-femme-en-cote-divoire-la-ministre-ly-ramata-a-presente-le-pagne-officiel/

Pourquoi se focaliser sur la confection et distribution de pagnes lorsque les conditions des femmes en ce qui concerne les violences basées sur le genre, leur autonomisation et toutes autres problèmes ne sont pas assez prises à bras le corps. Ce laxisme rayonnant des instituions qui parfois exaspère plus d’un.es. C’est bien beau de penser à faire des pagnes mais dans la pratique quelle valeur, cela apporte à ce jour ?

Cette journée nous rappelle entre autres qu’il y a beaucoup de travail à faire pour améliorer les conditions de vie de ces dernières. Alors, non ! le 8 mars n’est pas une fête dans laquelle l’on peut balancer des pagnes aux visages des femmes avec condescendance, c’est un jour où il faut repenser leurs droits. Faire le bilan des avancées et des régressions de leurs droits. Par conséquent, chanter ses louanges toute une journée pour que le lendemain, elle se retrouve encore dans le même bourbier, ne sert vraiment à rien et entre dans le cadre d’une certaine démagogie.

Pagne 8 Mars Burkina Faso (C)

Et pourtant, le pagne en tant qu’élément culturel inscrit dans notre patrimoine pourrait être un levier pour accélérer le travail de promotion des droits des femmes et de leur autonomisation. En effet, au regard de l’attachement que les femmes africaines et ivoiriennes lui portent , le ministère pourrait utiliser celui-ci comme un outil efficace. Comment me direz-vous ?

Déjà en associant les organisations de la société civile et les mouvements citoyens de défense des Droits des femmes à sa conception. L’objectif étant de travailler sur son impact visuel et stratégique. A terme, faciliter son appropriation par ces groupes qui à n’en point douter ont témoigné d’une influence populaire. Par ailleurs le pagne, à cause du fait qu’il bénéficie certainement d’un budget national doit pouvoir servir à sa vente aux femmes car c’est la cible ultime de ces dépenses. On pourra par exemple lancer un appel à projets dans les localités et les mettre en œuvre ,chaque année, les plus pertinents grâce à l’argent collecté. Au bout d’une décennie, l’on aurait véritablement fait avancer la condition féminine par un bout de tissu. Ce serait l’occasion de faire des foires culturelles où se mêleraient sensibilisation et dénonciation. Des jours entiers pendant lesquelles les femmes et les filles auront des réponses sur leurs droits. Nous croyons alors que personne ne mettrait en cause son utilité, ni ne boycotterait le pagne. Encore malheureusement, aucun compte n’est fait ni sur l’argent de la confection, ni sur celui de la vente. Mais, c’est un secret de polichinelle qu’année après année « le symbole de la fête des femmes » engraine des fonds qui ne font l’objet d’aucun audit. Et cela en surfant sur l’ignorance des femmes. 

Si l’on veut que la condition féminine change, il faut que celleux qui président aux destinées de notre nation en ait l’envie et s’en donnent les moyens. Il est encore incompréhensible qu’il y ait plus d’engouement sur le pagne que sur les droits eux même. Les femmes, ont plus que besoin de réponses. Une utilisation bien pensée du pagne peut donner une nouvelle envergure à cette journée. Si les critiques contre le pagne sont moultes, ce n’est pas anodin mais dénote plus d’un ras-le-bol. Il faut plus que jamais que les institutions changent leur vision de cette journée et que leurs actions soient plus efficientes pour apaiser les rancœurs. Arborer fièrement le pagne comme si la vie de ces femmes en dépendait est chose lassante, lorsque l’on voit les régressions de leurs droits sous nos tropiques. La portée de cette journée n’a vraiment pas été cernée par les autorités publiques et il faut y remédier au plus vite. Le 8 mars n’est définitivement pas la fête du pagne.

Par Manu Kahoyomo et Carelle Laetitia

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